"Un âge amer"
Les témoins de la Révolution et de l’Empire face à l’écriture de leur histoire
Durant plus d’un demi-siècle, les témoins de la Révolution et de l’Empire ont pris la plume, non seulement pour relater leurs carrières, mais aussi pour produire des études historiques sur la séquence 1789-1815 qui venait de s’achever, en adoptant la posture théoriquement impartiale de l’historien. Forts de leurs souvenirs et de leur documentation, à une époque où l’histoire déchaînait les passions, mais où les archives publiques n’étaient pas encore accessibles et où les témoignages personnels ou les papiers privés étaient les seules sources disponibles, ils ont brièvement détenu une sorte de monopole éditorial. Cependant, au fil des années, ces témoins furent de plus en plus souvent concurrencés par des historiens plus jeunes, moins marqués par les événements, qui ne ressentaient pas le besoin de s’expliquer ou de se justifier, et qui écoutèrent leurs confidences avec intérêt, mais aussi, de plus en plus, avec scepticisme.
En opérant un retour aux sources, notamment grâce à l’apport des archives de Lamartine, de Walter Scott, de La Fayette, de Thiers, de Michelet, de Tocqueville, de Las Cases, de Prosper de Barante ou du chancelier Pasquier, cet ouvrage étudie sous un angle original l’évolution des méthodes de travail des historiens, de la période romantique à la naissance du positivisme, mais aussi les premières polémiques autour de l’interprétation des grands événements de la Révolution et de l’Empire, qui laissèrent certains témoins pleins d’amertume. De nombreuses lettres, des manuscrits et des notes critiques inédites viennent enfin dévoiler le rôle de conseiller historique joué par certains personnages de premier plan comme Barère, Talleyrand, Metternich, Caulaincourt, Marmont ou encore Jérôme Bonaparte.