Avis de soutenance de thèse : Renaud Soler, "Une histoire de la sīraà l’époque ottomane (XVe-XIXe siècle). Production et formes de la manifestation du savoir historique sur la vie du prophète Muḥammad"
Monsieur Renaud Soler soutiendra sa thèse de doctorat, intitulée "Une histoire de la sīraà l’époque ottomane (XVe-XIXe siècle). Production et formes de la manifestation du savoir historique sur la vie du prophète Muḥammad", le vendredi 12 novembre 2021 à 9h en salle Louis Liard (Centre Sorbonne) devant un jury composé de :
Mme Catherine MAYEUR-JAOUEN –Professeur, Sorbonne Université (directrice de la thèse),
M. Éric VALLET –Professeur, Université de Strasbourg,
M. Stefan REICHMUTH–Professeur émérite, Université de Bochum,
Mme Samuela PAGANI–Professeur, Université de Salento,
M.Olivier BOUQUET–Professeur, Université de Paris,
M. Ruggero VIMERCATI-SANSEVERINO –Junior Professor, Université de Tübingen,
M. Jaafar BEN EL HAJ SOULAMI –Professeur, Université Abdelmalek Assaâdi (Tétouan).
Résumé :
Entre la fin du XVe siècle et la fin du XIXe siècle, dans les frontières de l’Empire ottoman, Arabes et Turcs produisirent un savoir historique sur la vie du Prophète Muḥammad, au sens que l’on donnait à cette époque à l’«histoire». Cette production était assurée à la fois par l’écriture de la sīra, ou des siyer-i nebī, et par des formes d’actualisation du passé, qui impliquaient la monumentalisation ou l’incorporation de fragments de ce savoir historique. La monumentalisation consistait à rendre tangible la présence agissante du Prophète dans le monde. L’incorporation relevait de l’inscription, dans le corps des fidèles, par des visites, des rituels ou des fêtes communautaires, de fragments du passé prophétique. Dans un monde dominé par l’analphabétisme, ces deux modes d’actualisation concouraient à la présence du passé, au moins autant que l’historiographie. À partir d’une étude quantitative de la production historiographique sur la vie du Prophète, nous explorerons pas à pas le corpus arabe et turc ottoman de la sīraproduit à l’époque ottomane, pour discerner la structure de son intertextualité, son évolution historique, et surtout établir les règles du fonctionnement de cette économie manuscrite du savoir. Nous essaierons aussi de déterminer quelques formes de monumentalisation et d’incorporation associées aux grands moments de la vie du Prophète, telle qu’elle était racontée dans l’historiographie. Nous montrerons comment, selon des rythmes divers, cette économie de la sīrase désintégra dans la deuxième moitié du XIXe siècle, sous l’effet de la diffusion du livre imprimé, des transformations politiques et de la mise en place de nouvelles modalités de production et de manifestation du savoir historique.